Réseau Wallon de Lutte contre la Pauvreté

https://www.rwlp.be

Christine Mahy (secrétaire générale et politique du RWLP)

Anne-Sophie Noiret (coordinatrice PEP-RWLP)

Quelle question mériterait d’après vous un examen collectif dans le cadre des Assises de la prévention?

Une question qu’il nous paraît nécessaire d’investiguer concerne la prévention sociale.
Nous voudrions que soient mises au travail collectivement trois dimensions.

– La prévention sociale consiste-t-elle bien à agir sur les causes structurelles qui font que trop de jeunes sont contraints de mettre en œuvre des pratiques de débrouille qui épuisent leur créativité, de faire taire leurs aspirations, d’introjecter un sentiment de culpabilité (par exemple à cause de l’explosion de leur collectif familial) ?
Des politiques structurelles contribuent à produire ces effets. Il nous semble que la prévention doit empêcher que de tels effets se produisent. Pour nous, le travail socio-éducatif ne peut se réduire à jouer un rôle de compensation, voire de contrôle renforçant/justifiant la production des inégalités.

– Est-on d’accord de dire que dans ce cas la prévention sociale concerne toutes les matières et tous les niveaux de pouvoir, dans leurs relations et conséquences en cascade ? Et que donc il s’agit de sortir d’une logique « bureaucratique » (où chacun reste sur son quant à soi, accroché à son « silo »), mais aussi corporatiste (où tel secteur cherche essentiellement à se rendre « visible » plutôt qu’à s’allier) ?
Les deux crises que nous venons de traverser (sanitaire, inondations) ont permis de faire des brèches dans un des dispositifs qui symbolise à nos yeux l’inégalité et les obstacles qui empêchent trop de jeunes et de familles vulnérables de sortir de leurs difficultés : la non individualisation des droits, soit le statut cohabitant.
N’est-ce pas le bon moment pour espérer enfin une victoire significative en la matière ? Ce serait en tout cas une transformation décisive pour beaucoup de jeunes et de familles.

– Peut-on alors réfléchir aux moyens multiples, politiques au sens large, qui permettraient de coaliser effectivement les forces et les expertises, avec, au premier chef, celles des premiers concernés eux-mêmes ?

Pourquoi cela vous apparaît-il nécessaire ?

Cela paraît nécessaire pour deux raisons : d’abord au vu de la situation des jeunes et des familles, qui vivent les conséquences d’une montée des inégalités, conséquences qui touchent à tous les domaines de la vie ; ensuite, parce que cette revendication n’est pas nouvelle, mais qu’elle tarde à se concrétiser : elle était déjà proposée il y a quasi dix ans, par exemple dans le cadre du « Plan jeunesse » et du groupe de travail « Lutte pour l’égalité et prévention générale ». Les plans se succèdent, mais les actions de transformation ne se concrétisent pas. L’accent nouveau mis sur la prévention et notamment la prévention sociale joue sa crédibilité sur la concrétisation de progrès sociaux.

Quelles sont vos attentes par rapport à ce travail d’exploration ?

Peut-on acter que la pertinence de la prévention sociale dépend des victoires dont ce type d’actions pourrait se prévaloir ? Il ne s’agit pas de regretter, voire de dénoncer, il s’agit d’obtenir des transformations. Nos attentes portent sur celles-ci, avec l’espoir que bien des acteurs pourront se coaliser pour obtenir des avancées réelles, qui se manifestent dans l’ordre des choses et pas seulement dans l’ordre des mots. Nous sommes bien entendu tout à fait disponibles pour participer à ce combat dont le RWLP fait une de ses priorités.