Projet “Tous au chapiteau”

Porteurs: une collaboration entre le CEC les “nez coiffés” spécialisé dans le cirque et le théâtre et l’AMO Basse Sambre

http://amobassesambre.be

http://nezcoiffes.be

Présentation: il s’agit d’implanter un chapiteau de cirque au milieu d’un quartier populaire pendant une semaine et de clôturer l’événement par un spectacle. Nous travaillons avec un groupe de jeunes pour construire celui-ci durant plusieurs semaines de stage et l’originalité du projet est que celui-ci n’est pas clôturé, il reste ouvert à la participation de jeunes du quartier.
C’est à ce niveau que le travail de rue est important, pour informer, inviter les jeunes et les inclure avec leurs capacités. L’essentiel, à nos yeux, reste de donner une scène importante à l’expression collective de jeunes.

Quel est le fait social concerné?

La parole des jeunes surtout de quartier populaire est peu souvent entendue, réduite à une récolte éphémère et guidée (questionnaire), véhiculée par l’intermédiaire d’autres intervenants (les jeunes disent, les jeunes veulent, …) avec toute la subjectivité voire l’intérêt personnel que cela implique.

On peut également remarquer que traduite médiatiquement, leur parole, souvent en réaction à un évènement négatif, est réduite trop régulièrement à faire s’exprimer ceux qui parlent le plus fort.

Il en ressort cette observation chez les jeunes qu’ils peuvent être sujet à être interpellé (avec une confiance limitée dans les résultats de la démarche) mais également l’intuition que la valeur de leur expression se limite à ça.

Finalement, le processus normé: questionnaire, besoin, que les jeunes nous rentrent un projet, que l’on fasse des réunions, est essentiellement confortable pour les adultes mais parle assez peu aux jeunes du monde populaire que nous rencontrons.

Quels sont les Groupes concernés?

Dans cette expérience, nous nous adressons en particulier à deux groupes de jeunes.

Le premier groupe, surtout des adolescents, nous rejoint dans le cadre d’un atelier cirque-théâtre en vue de construire un spectacle. Une partie de ces jeunes ont eu l’information et l’invitation via notre travail de suivi individuel ou collectif, les autres avaient déjà eu l’occasion de faire ce type d’activités auparavant. Par conséquent, nous connaissons bien le parcours, la fragilité et les difficultés d’une grande partie de ces jeunes. Notre influence dans leur participation est forte.

Le deuxième groupe surtout des enfants, est très local. Ils viennent essentiellement car nous avons planté un chapiteau en plein milieu de leur lieu de vie et fait un travail de rue d’information sur l’activité. Nous ciblons les cités d’habitations publiques où la précarité des habitants (notamment financière) est un fait connu.

Enfin, si nous ciblons directement les jeunes, notre action a un effet sur les adultes du quartier, en particulier les familles.

Quelle description de la problématique peut être faite?

La problématique, à nos yeux, n’est pas tant que la parole des jeunes soit peu entendue, mais qu’ils intègrent un manque de capacité, un défaut de qualité d’expression. Comme si, de toute manière, et encore davantage si tu viens d’une cité, tu es peu capable d’une grande éloquence ou de toute autre forme d’impact fort (par l’écriture, la peinture, la danse, …) ou alors d’une manière stéréotypée et attendue.

Par conséquent, l’expression collective à peu de valeur, peu de pouvoir de changement par défaut de légitimité. On n’écoute que les gens importants et très médiatisés mais également ceux qui ont de grandes qualités à s’exprimer.

Les jeunes sont beaucoup plus souvent confrontés à des espaces où on leur demande de se taire (l’école, l’espace public) que d’exprimer leurs désirs, leur vision du monde.

Que cherche-t-on à prévenir?

La réduction du capital culturel des jeunes et l’effet de reproduction en œuvre dans les milieux les plus précarisés où l’on assimile un défaut d’aisance sociale et de capacité à s’exprimer en public comme inéducable et justifié.

La limitation de l’accès à la culture qui débouche sur une une prestation collective d’expression publique.

Quel est le timing de l’action?

C’est une action qui prend 6 mois pour sa réalisation et un temps indéfini pour en assurer le suivi car nous nous situons dans une logique de propension:

  • Carnaval – printemps : Constitution d’un groupe de jeune autour de la création collective d’un spectacle mêlant théâtre et cirque (2 semaines de stages);
  • Au printemps, les travailleurs de rue commencent à présenter l’action, à annoncer la venue d’un chapiteau;
  • 15 jours avant l’évènement, ils se montrent plus précis sur le sujet, distribuent des folders, invitent à être présent le lundi (ou mardi si spectacle le samedi) matin pour s’inscrire, donnent toute les informations pratiques;
  • Une semaine avant le chapiteau (souvent en été), le spectacle est finalisé lors d’un stage avec de nombreuse possibilités d’intégration, d’insertion pour les jeunes du quartier;
  • Le chapiteau est monté avec l’aide de tous les bénévoles (parents, habitants du quartier, jeunes des différents groupes), il faut compter une journée de travail;
  • Toute la semaine avant le spectacle, les matins sont consacrés à des ateliers (toujours cirque – théâtre) et des répétitions, on cherche ensemble quelle place va être occupée par les jeunes du quartier. En général, les jeunes du premier groupe aident les plus petits dans les ateliers cirque (jonglerie, équilibre, acrobatie);
  • Le reste du temps, le chapiteau est mis à disposition d’autres partenaires (centre culturel, maison des jeunes, éducation permanente) ou d’un conseil de quartier;
  • Durant cette semaine, les travailleurs de rue vont continuer à zoner tous les jours autour du chapiteau et dans le quartier. Leur but est de faire le lien entre l’activité et les jeunes et d’informer de la date du spectacle;
  • Le jour J, c’est la dernière répétition, le maquillage, les costumes, l’accueil du public (souvent nombreux) et puis… Lumières;
  • A la fin du spectacle, nous essayons d’organiser un moment festif (barbecue, verre de l’amitié ,…) afin de favoriser un maximum l’échange et la valorisation des jeunes acteurs;
  • Le lendemain, démontage du chapiteau toujours avec l’aide de bénévoles;
  • Poursuite du travail et de rencontre des jeunes – enfants par la continuité du zonage des travailleurs de rue. Il s’agit alors de capitaliser sur l’évènement extraordinaire.

Quelle transformation sociale est souhaitée?

Nous voulons favoriser le fait que des jeunes (surtout provenant de quartier stigmatisé) «l’ouvrent» lorsque personne ne leur demande de le faire! Et que dans une société du buzz, du marketing, de la sensibilité politique à l’image médiatique, ils puissent être impactant par l’utilisation d’une bonne éloquence ou de techniques surprenantes.

Pour cela, il faut commencer par leur montrer qu’ils sont capables collectivement d’une expression de qualité écoutée attentivement par un public.

De ce fait, nous souhaiterions que la parole des quartiers, des jeunes soit comme notre chapiteau : «impossible à ignorer».

Quels sont les acteurs mobilisés et quelles relations seront construites entre eux ? Quels sont les apports et retours espérés pour chacun d’eux ?

Les animateurs du CEC, font émerger les désirs, soutiennent la structuration d’échanges, d’idées, étapes par étapes en un spectacle (création collective). Ils montrent et apprennent des techniques particulières aux jeunes et sont proches des travailleurs sociaux de l’AMO.

Les travailleurs sociaux de l’AMO assurent la transmission de l’information et vont à la rencontre du public par le biais du travail de rue. Ils sont à côté des jeunes dans la préparation du spectacle, ils reconnaissent et valorisent leurs efforts et leurs succès. Ils gèrent la dynamique collective (espace de paroles, …).

Le groupe de jeunes inscrits dans les stages et la construction du spectacle, va se former à l’acquisition (ou parfois la maîtrise) de techniques de cirque et à l’aide d’improvisation, de jeux d’acteurs, va faire émerger un concept de spectacle qui sera travaillé étapes par étapes pour devenir un tout cohérent et diffusable. Lors de la semaine d’ateliers sous le chapiteau, ils vont soutenir, intégrer et aider les autres jeunes à trouver une place dans le spectacle.

Le groupe de jeunes de la cité, va participer à des ateliers tout au long de la semaine, prendre du plaisir au jeu (acteur – cirque), apprendre des techniques nouvelles et réfléchir à la place qu’il aimerait prendre dans la représentation finale devant le public.

Le public est essentiellement local (familles, habitant du quartier), il va assister au spectacle et son principal rôle est de renforcer les compétences des jeunes par le biais d’un regard positif sur leur action.

Autres éléments que vous souhaitez mettre en avant

De plus en plus souvent, nous essayons d’organiser des actions qui sortent d’une logique stricte du projet: c’est à dire notamment d’une recherche à rencontrer des indicateurs d’objectifs fixés par nos soins dans un timing fixé à l’avance. Cette action en est un exemple, l’important étant évidemment de valoriser les jeunes participants mais également de rester présent, par la suite, pour saisir toute occasion de cheminer ensemble dans la construction d’une expression collective.

Nous plantons des graines et essayons d’avoir un terrain propice mais ne savons pas quelles fleurs vont jaillir de terre. C’est un travail qui nécessite un investissement important et durable.